"La mondialisation n'est pas un jeu à somme nulle"

Le ministre fédéral allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, et le président de la Deutsche Bundesbank, Jens Weidmann, ont donné à Berlin le coup d'envoi de la présidence allemande du G20. En présence de son ambassadeur en Allemagne, Shi Mingde, la Chine, qui avait assumé la présidence précédente du "Groupe des vingt", a symboliquement remis à la République fédérale le bâton de relais.

M. Schäuble a remercié la Chine pour l'excellent travail fourni au cours de sa présidence, un travail que l'Allemagne voudrait maintenant poursuivre sans interruption. Jusqu'à fin novembre 2017, ce sera au tour de l'Allemagne de définir l'agenda du "Groupe des vingt" (G20), le forum informel essentiel pour la coopération économique des principaux pays industrialisés et émergents.

Pas de retour au nationalisme et au protectionnisme

M. Schäuble a souligné dans son discours la nécessité de trouver des solutions globales à des défis globaux. "Nous ne pourrons surmonter les problèmes de ce monde que si nous continuons de coopérer", a-t-il déclaré. "Le G20 est plus important que jamais." Ainsi, il convient de mieux façonner la mondialisation, au profit des citoyens et contre le sentiment croissant d'une inégalité de plus en plus forte entre riches et pauvres, ce qui nécessite un libre-échange mondial et des marchés ouverts, a-t-il ajouté. "La réponse n'est certainement pas un retour au nationalisme et au protectionnisme", a souligné M. Schäuble.

Dans son discours tenu devant plusieurs centaines de délégués des États membres du G20, M. Weidmann s'est lui aussi prononcé en faveur de marchés ouverts. "La mondialisation n'est pas un jeu à somme nulle", a-t-il souligné. "Grâce au commerce international, nous allons mieux dans l'ensemble", a déclaré M. Weidmann. C'est cette conviction qui a uni le G20 au lendemain de l'effondrement économique intervenu à la suite de la crise financière, a-t-il indiqué.

Même si un nombre croissant de citoyens doutent maintenant des avantages liés aux marchés ouverts et au commerce transfrontalier, il convient, selon M. Weidmann, de ne pas oublier que les économies sont fortement imbriquées les unes dans les autres. Il a exprimé l'espoir que le G20 "restera fidèle à son attachement à des marchés ouverts avec une concurrence équitable, que des réformes en vue de davantage de croissance et d'emplois seront réalisées et que des budgets publics durablement robustes seront recherchés".

Afin que des dettes publiques élevées comportent moins de risques pesant sur la stabilité financière à l'avenir, M. Weidmann a suggéré de mener une discussion à ce sujet dans le cadre du G20. Il a rappelé que les réglementations constituaient une incitation permanente pour les banques à investir excessivement dans des titres d'emprunt d'États, ce qui crée, selon lui, une interconnexion problématique entre banques et États. Il a par ailleurs souligné les avantages des obligations indexées sur le PIB. Si elles sont bien conçues, elles peuvent contribuer à réduire le risque de défaillances publiques, a expliqué M. Weidmann. Dans le cas de ces titres d'emprunt d'États, le niveau des intérêts dépend de l'évolution du produit intérieur brut (PIB) du pays.

Des innovations prometteuses

Dans son discours, M. Weidmann a également abordé le thème de la numérisation du secteur financier en tant qu'une des priorités de la présidence allemande du G20. "Pour les acteurs établis sur le marché des capitaux, la numérisation offre des possibilités de travailler de manière plus rentable. En même temps, la concurrence accrue dans un environnement déjà difficile constitue un défi supplémentaire", a-t-il expliqué.

Le président de la Bundesbank s'est montré optimiste notamment en ce qui concerne la dimension technologique des innovations dans le secteur financier. "Je pense que des innovations très prometteuses ont été réalisées, dont nous ne pouvons en partie pas encore imaginer les avantages pratiques", a-t-il déclaré. À titre d'exemple, il a mentionné la technologie des "registres distribués" (Distributed Ledger Technology). Ainsi, la monnaie virtuelle bitcoin repose sur un tel registre de transactions décentralisé. Mais cette technologie permet également de transférer d'autres droits de propriété, par exemple des droits sur des valeurs mobilières.

Promouvoir l'inclusion financière

Selon M. Weidmann, ce ne sont pas uniquement les consommateurs dans les économies développées ayant une affinité pour la technologie qui profitent des évolutions technologiques. "La numérisation du secteur financier présente un important potentiel de développement en particulier pour les économies moins développées", a-t-il indiqué en ajoutant qu'au Kenya, la proportion des personnes disposant d'un compte bancaire était ainsi passée de 42 pour cent en 2011 à 75 pour cent en 2014. "L'inclusion financière est considérée comme étant bénéfique à la croissance économique et à la diminution des inégalités", a souligné M. Weidmann. Mais cela nécessite également un élargissement de l'éducation financière, a-t-il précisé.

Acccompagner avec bienveillance la numérisation du secteur financier

Selon l'avis du président de la Bundesbank, les innovations numériques dans le secteur financier, tout comme l'ensemble du secteur financier, devraient être régies par une réglementation judicieuse. "Des lacunes au niveau de la réglementation ne doivent pas constituer la base de modèles d'affaires", a-t-il déclaré. Parmi les objectifs de la présidence allemande figure par conséquent aussi un inventaire des différentes approches régulatoires.

Selon M. Weidmann, les régulateurs d'aujourd'hui ont la possibilité d'influencer, de manière décisive, le monde du secteur financier numérique de demain. "Nous devrions voir cela comme une chance et accompagner avec bienveillance la numérisation du secteur financier, sans perdre de vue les risques qui y sont liés", a déclaré le président de la Bundesbank.